Le blog de Flora

Un plat de lentilles...

27 Juillet 2023, 16:49pm

Publié par Flora bis

   Le ciel gris, le doux tapotement de la pluie sur la terrasse et les 18° au thermomètre nous invitent à la réflexion ou à la rêverie... Pas mieux. Devant l'écran  -  ou la vaisselle qui attend depuis hier soir dans l'évier (j'ai beau laisser leur chance aux petits Schtroumpfs invisibles pour la faire disparaître pendant la nuit, peine perdue!)... Quelle motivation trouver pour faire bouger son corps, le décoller du fauteuil? De l'écran surtout qui, mirage addictif et consolant, apporte un peu de dynamique, un peu d'amitié virtuelle dans la grisaille du quotidien? Je suis injuste. Ma voisine vient de m'apporter une assiettée de lentilles fraîchement cuites et assaisonnées! Deviendrai-je au moins riche (grâce aux lentilles), avec mon spleen sous la pluie?... Mais non, j'aurai une villa dans quelque paradis de riches, forcément ensoleillé, avec le personnel qui ôtera tous les soucis de mes épaules, puisqu'il sera payé pour cela. 

    Il n'y a que deux ou trois bricoles que ma fortune hypothétique (grâce aux lentilles) ne pourra  point compenser : ma jeunesse enfuie, ma santé flageolante et et mon optimisme jadis solaire...

L'oiseau de la céramiste Andrea Vertel s'est réfugié sur la terrasse mouillée

 

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Qu'ai-je en commun avec Lady Jane?

21 Juillet 2023, 12:30pm

Publié par Flora bis

    Une véritable obsession, celle de perdre mon temps, me tourmente (taraude, tenaille, tarabuste, turlupine, tracasse, torture etc  -  tiens, bizarrement tout me revient en "t"!...), m'empêche d'avoir l'esprit détendu et de profiter du soleil, écoutant mes envies. Mais en ai-je encore, vraiment?... Les temps ont bien changé.

   La mort de Jane Birkin a suscité une avalanche de réactions, bien plus que l'on n'aurait imaginé à propos de la disparition d'une chanteuse et actrice de son envergure. Sa vie, publique et privée  confondues, libre et inspirante s'est déroulée devant les yeux des spectateurs. Ce que la nostalgie ressuscite à travers sa figure est plus que l'artiste : c'est toute une époque qui semble avoir été un véritable âge d'or à nos yeux d'aujourd'hui. Comme d'habitude, le bonheur ne devient palpable que dans le rétroviseur. 

   "La ballade de Jane B. s'enracine évidemment dans tout ce qu'elle a incarné à ses débuts et continue à charrier dans nos imaginaires : la décontraction iconoclaste du Swinging London; un érotisme longiligne qui a renversé sur son passage les canons pulpeusement établis de la beauté; le couple scandaleux et passionné qu'elle a formé avec Serge Gainsbourg. Gainsbourg, dont sa voix toujours jeune et toujours au bord de se briser a si bien interprété les chansons." (éditorial de L'Obs du 20 juillet 2023, G. Leménager)

   Nous sommes à un an de près de la même génération. Tout le reste nous sépare. Elle, fille d'un Occident qui brise les carcans de la société engoncée dans la bien pensance conformiste de l'après-guerre, suivie de l'ère d'une consommation triomphante et abondante. Moi, je vis de l'autre côté du "rideau de fer", dix ans après la révolte d'octobre 1956 et son écrasement dans le sang, suivis de la consolidation du régime. Je suis étudiante à la fac et les échos lointains du Mai 68 et du Printemps de Prague nous arrivent, même filtrés par le pouvoir.

   Le régime est obligé de desserrer l'étau. Nous commençons à respirer un peu. Bien sûr, la censure  -  et même une certaine auto-censure  -  régnent, nous savons jusqu'où nous pouvons aller trop loin pour préserver les maigres mais précieux acquis. C'est ainsi que nous pouvons communier maintenant dans la (presque) même nostalgie de cet "âge d'or" si court qu'était notre jeunesse partagée...

Qu'ai-je en commun avec Lady Jane?Qu'ai-je en commun avec Lady Jane?

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"Mann Tracht, und Gott lacht"...

16 Juillet 2023, 13:24pm

Publié par Flora bis

   Je regarde le température du dehors : 20°. Nous sommes en plein juillet et si je ne craignais pas autant la canicule, je trouverais cela piteusement bas pour un été digne de ce nom. Quand je pense à la vague de chaleur qui sévit autour de la Méditerranée (et ailleurs), j'enfile la petite laine avec soulagement.

   Comme je m'y attendais, le monde se dépeuple autour de moi, je reçois des échos lointains de vacances joyeuses et/ou exotiques, en famille ou entre amis. J'essaie de prendre des nouvelles d'amis esseulés comme moi. Souvent, cela se transforme en bulletin de santé. 

   Une de mes amies proches s'est vu changer ses projets de repos et de voyages en une fraction de secondes. En sortant du don de sang (d'où une probable baisse de tension), elle a fait une chute sur un trottoir du centre ville et elle est revenue jusque chez moi on ne sait comment, en conduisant sa voiture avec la seule main gauche...  Au moment où je l'ai cueillie sur le pas de ma porte, elle tenait à peine debout... Tout de suite, j'ai appelé les pompiers qui ont fixé son bras droit en écharpe et l'ont transportée à l'hôpital où elle a passé tout l'après-midi en examens et soins. Résultat : bras et épaule droits immobilisés contre son corps pour 6 semaines! Heureusement, la solidarité familiale et amicale l'aidera à traverser l'épreuve!

   Je pense à la phrase que j'ai entendue tant de fois dans mon enfance : "Ember tervez, Isten végez." On pourrait le traduire par "L'homme fait des plans, Dieu a le dernier mot." Apparemment, cela viendrait de l'allemand "Mann tracht, und Gott lacht."  ("L'homme échafaude des plans /"pense"/, Dieu rit"). Les incroyants peuvent remplacer le mot "dieu" par "destin", l'idée est dans l'impossibilité de maîtriser tout ce qui nous arrive. Que l'on soit croyant ou superstitieux, cela  apprend un peu d'humilité à l'homme gorgé d'orgueil et de sentiment d'invincibilité.

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La révolte de Saint-Bernard * (micro fiction)

4 Juillet 2023, 11:56am

Publié par Flora bis

      "...La sonnerie retentit sur la porte d'entrée. Je viens de m'installer dans mon unique fauteuil, avec le livre à la couverture bleue nuit. Il me faisait de l'oeil depuis ce matin : une tentative d'évasion!

    Mon vieux réflexe de Saint-Bernard m'incite à aller ouvrir, cependant, je reste clouée à ma place.  Cela ne peut être qu'elle! Après tout, de quel droit me dérange-t-elle à tout bout de champ, sans demander mon avis, piétinant la quiétude fragile que je décide enfin à m'offrir, cadeau rare, à moi seule? J'ai réussi à ignorer les devoirs qui m'attendaient, cuisine, ménage, potager, chien à promener, tout ce que je m'impose pour éviter la noyade. La profondeur noire, opaque qui m'attire comme une promesse de délivrance de toute pesanteur, toute torture sophistiquée à petit feu. 

   Lâchez-moi la grappe, tous les casse-pattes du monde, avec vos histoires au ras des pâquerettes et ne me tirez pas vers votre néant! Qu'ai-je à cirer, à brosser, à battre, à secouer de vos jacasseries médiocres qui engloutissent le temps précieux qui reste de ma vie? Vos ragots de boniche effrontée, de fils ingrat, de mari acariâtre et impuissant qui de surcroît, ronfle toute la nuit? De vos jérémiades qui n'en finissent pas de tourner  -  exclusivement  -  autour de votre nombril décrépit?...

   Vous me prenez pour votre poubelle dans laquelle déverser les déchets de votre existence mesquine, vos lamentations égotistes, au lieu de vous regarder dans la glace. A la place de ce geste salutaire, vous préférez le rôle réconfortant de l'éternelle victime. Mais la victime, c'est moi. "

 

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