Le blog de Flora

Le pouvoir des mères

25 Juin 2019, 18:34pm

Publié par Flora bis

“Avec l'amour maternel, la vie vous fait, à l'aube, une promesse qu'elle ne tient jamais. Chaque fois qu'une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son coeur, ce ne sont plus que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d'amour, mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. (...)"

Romain Gary, La promesse de l'aube

   Ah, les mères!... Quel pouvoir exorbitant détiennent-elles... Elles peuvent vous donner des ailes tout comme les couper; vous anéantir, vous adorer tout en vous enchaînant. Pendant longtemps, leur regard est le seul miroir dans lequel se reflète le monde.

   Romain Gary a dressé un monument de mots à la sienne, tout comme Albert Cohen et beaucoup d'autres. La "mère juive" est devenue l'archétype de possessivité, d'intrusion, d'exclusivité, de dévouement sans bornes dans la vie de ses enfants (surtout les fils). Souvent, elle réalise ses propres ambitions impossibles à travers eux.

   "Vipère au poing" d'Hervé Bazin est le portrait terrible de la mère cruelle incapable d'émotion que le fils doit tuer, du moins symboliquement, pour survivre: "Je te cause, Folcoche, m'entends-tu ? Oui, tu m'entends. Alors je vais te dire : T'es moche ! Tu as les cheveux secs, le menton mal foutu, tes oreilles sont trop grandes. T'es moche, ma mère. Et si tu savais comme je ne t'aime pas. Je pourrais te dire que je te hais, mais ça serait moins fort.

   Le lien d'amour démesuré n'a d'égal que celui de la haine destructrice... Entre les deux, une infinité de variantes. Je ne cesse d'interroger ma propre histoire afin de comprendre mon héritage, puis le chemin parcouru (et que je parcours encore) avec ce pouvoir immense dans les mains, cette responsabilité non moins grande sur les épaules...

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A chacun sa vérité

23 Juin 2019, 18:02pm

Publié par Flora bis

  Je connais des gens qui s'accrochent à leur vérité comme le petit chien à son bout d'os, incapable de le lâcher, montrant ses crocs avec détermination si quelqu'un l'approche. Ces personnes sont généralement persuadées d'avoir raison et il leur faut à tout prix avoir le dernier mot. Des convictions en béton armée, sans l'ombre d'un doute, sans un instant d'hésitation qui leur conférerait un soupçon d'empathie, de capacité à se mettre à la place de l'autre, d'envisager ainsi une petite brèche dans leurs certitudes, afin qu'un embryon de communication sans agressivité puisse apparaître... Pour que le monde tourne en rond, il faut se ranger de leur côté, sinon, on est taxé de mauvaise foi, de provocation, voire d'agressivité à leur égard... Psychorigides? Mauvais coucheurs? Ours mal léchés? Chicaneurs?... Les nuances ne manquent pas mais il y a un fond commun. L'impossibilité de lâcher prise, de lâcher le contrôle. 

   D'où vient cette obstination? J'ai toujours soupçonné des blessures  lointaines dont on n'a même plus conscience, celles qui ont leur origine dans l'enfance, la plupart du temps. Il ne reste que les cicatrices, tenaces même invisibles. Toute crispation vient de ces réflexes de défense qui ont construit la forteresse imprenable dans laquelle la personne se réfugie pour se rassurer, pour se croire à l'abri... L'adversité est représentée par les autres qui ne partagent pas sa vérité et qui s'attaquent ainsi à son "bunker"... 

   La solution? Lâcher prise, ouvrir ses fenêtres vers les autres. S'accepter, avec ses faiblesses, ses imperfections; avec le fait qu'on ne détient pas forcément la vérité. Etre indulgent avec soi-même, s'aimer, pourquoi pas?...

"Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j'ai cessé de chercher à avoir toujours raison"  (Chaplin)

 

 

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De l'Amour, simplement

16 Juin 2019, 12:11pm

Publié par Flora bis

  Nous sommes un petit groupe à alimenter un blog commun. Son administrateur change régulièrement de sujet. Le dernier en date : "l'Amour". Si vaste et  si délicat à la fois.

   Je suis de la génération qui a eu 20 ans à la fin des années soixante. A cheval entre la morale corsetée de nos parents et le début de la libération des moeurs. Un jour, encore étudiante en français, je devais accompagner une délégation égyptienne comme interprète. A un moment de la conversation, ils me posent des questions sur les relations entre filles et garçons de mon âge, dans la Hongrie de l'époque. Que se passe-t-il si je "cède" à un garçon et celui-ci me laisse tomber puisque, ayant perdu "ma pureté", je ne serais plus "digne d'être épousée"? La question me surprend et m'indique l'abîme qui sépare une société musulmane (même "nasserienne") et la nôtre... Je réponds simplement, un peu bravache, que je n'aurais aucun regret car en agissant ainsi, le garçon prouve qu'il ne m'aurait pas "méritée"... Et que, de toute façon, mon seul but dans la vie n'était pas de dénicher un mari.

   C'était le principe mais la réalité était beaucoup plus complexe. Notre liberté était limitée par la peur de tomber enceinte (l'avortement et la contraception étaient libres mais ils nécessitaient des visites médicales préalables). Ainsi, nous nous imposions les limites nous-mêmes.

Leningrad, 1971

   L'amour devenait de la sorte très éthéré, très fantasmé et très important. Nos flirts, même poussés, s'arrêtaient aux baisers enflammés, aux promenades romantiques, en attendant l'apparition de "l'homme de notre vie" qu'une certitude intime devait nous désigner: cette petite voix intérieure qui vous avertit  -  ou qui vous fait croire  -  que c'est votre destin qui frappe à la porte...

   Nous avons beaucoup flirté pendant nos années estudiantines, malgré la charge de travail écrasante de la fac. Nous avions 21-22 ans, ce qui semble "canonique" aux générations actuelles, pour hésiter encore devant "la chute", comme nous évoquions alors avec ironie une relation sexuelle. Pendant notre stage d'un an et demi à Moscou et à Leningrad, avec mon amie hongroise, Marie, "compagnonne de chambrée", nous nous sommes jetées avec gourmandise dans la découverte des contrées exotiques. Je dois dire que nous avons eu beaucoup de chance d'être toujours tombées sur des "chevaliers sans reproches"  -  ou alors, les temps étaient encore très différents...

   Il y aurait beaucoup à raconter sur ces années légères et graves à la fois, si déterminantes dans l'apprentissage de la vie d'adultes qui nous attendait. Pour moi, elles ont pris fin avec la rencontre avec Gilbert. Nos 33 ans communs ont entièrement rempli ma vie, sans laisser la moindre place à une pensée, un regard de côté... Et même sa mort, il y a bientôt 13 ans n'y a rien changé.

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Point lumineux

10 Juin 2019, 10:54am

Publié par Flora bis

Annette, Cathy, Godelieve et Annie

    Quelle conclusion à une semaine mouvementée, commencée pour moi, physiquement et moralement, au ras des pâquerettes!... RDV médicaux, pharmacies, douleurs et découragements, sous un ciel changeant, entre averses et soleil opaque, sans oublier le vent violent: le cocktail parfait pour secouer les rares moments de quiétude de ces derniers temps. Ce vendredi 7 juin représentait le point lumineux que je fixais comme un naufragé, pour pouvoir tenir jusque là, coûte que coûte!

   Mes quatre lectrices talentueuses, généreuses et joyeuses ont conquis le public, une fois de plus. C'est une chose étrange d'entendre son texte approprié, porté, partagé  -  faire vivre  -  par des interprètes qui y ajoutent leur propres couleurs... L'écouter comme s'il n'était pas votre créature, enfin, pas tout à fait: un peu comme regarder son enfant devenu adulte vivre sa vie; le fil qui vous attache reste indestructible mais assez distendu pour le laisser mener sa barque en pleine autonomie.

   Les échanges qui ont suivi étaient riches d'amitié, d'accueil chaleureux et spontané de la part du public que je ne connaissais pas. Mais ici, dans le Nord, une telle ambiance n'a rien d'étonnant! Et d'autres "points lumineux" sont nés pour continuer l'aventure à la rentrée...

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Epuisement

3 Juin 2019, 18:40pm

Publié par Flora bis

   Ces derniers jours, j'ai passé très peu de temps devant mon ordinateur: tout juste ce qu'il faut pour la chasse aux RDV médicaux... C'est une occupation sans joie, pleine de stress et de découragement. Dès que j'ai un problème, même minime, famille et amis se jettent sur moi avec le même cri d'assaut: "Tu as vu un médecin?" (oui, j'en ai vu énormément ces dernières années...) Variante: "Tu as pris RDV chez un médecin?" (j'essaie...)

   Ces questions m'épuisent, bien qu'elles reflètent les meilleures intentions du monde, parfois une vraie inquiétude à mon égard. Mais mon moral étant déjà au plus bas, je dépense énormément d'énergie pour garder la face, et pour éviter de susciter l'apitoiement sur mon triste sort, je préfère l'humour parfois teinté de noir en essayant de tourner mon angoisse en dérision. Ces questions sonnent à mon oreille comme des cris de guerre (on veut me passer dans des mains médicales pour se soulager, se décharger  -  en même temps, que faire de mieux?...)

   L'âme humaine insondable est faite de contradictions.

   Pourtant, c'est simple: JE VOUDRAIS DESCENDRE!... Descendre de cette "montagne russe" faite de consultations, de passages réguliers dans des tunnels de machines savantes, de bilans, de tournures inattendues des résultats qu'il faudra digérer, accepter, combattre (mais comment? alors qu'on a l'impression d'être une feuille jaunie en train de tomber de sa branche...) Je voudrais me réveiller de ce cauchemar et atterrir dans une prairie ensoleillée, paisible et fleurie... 

   Comme je n'en ai pas connu depuis longtemps.

 

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