Le blog de Flora

Sous les "Soleils noirs" du Louvre-Lens

4 Juillet 2020, 19:06pm

Publié par Flora bis

"J'ai tout donné au soleil

Tout sauf mon ombre"

(Guillaume Apollinaire, "Fiançailles" in Alcools, 1913) 

   Une belle exposition se préparait pour le 25 mars dernier au musée du Louvre-Lens, à 1 h de voiture de chez moi. L'épidémie et le confinement ont repoussé son ouverture jusqu'au début du juillet. Nous l'avons visitée hier avec trois de mes amies.

   Le noir est-il une couleur? Est-il l'absence des couleurs ou leur somme, à la manière d'un trou noir glouton qui les aurait toutes avalées? En tout cas, les 150 oeuvres prestigieuses exposées illustrent que les artistes s'y intéressent depuis des siècles.

   Les images me reviennent sans cesse: la nuit et ses monstres effrayantes... Celle, éternelle, de la mort et du deuil. Le noir et le sacré, les "vanités" qui nous invitent à nous pencher sur l'inéluctable, à y réfléchir afin de rendre notre vie plus digne et plus sage, voire à en profiter mieux... La pénombre et l'obscurité, destinées à mettre en valeur la lumière car elles ne peuvent exister l'une sans l'autre, ni sans la tension dramatique de leurs contrastes... La solennité luxueuse des portraits du 17e - 18e siècles, aux tissus noirs très rares et très coûteux que seuls les puissants pouvaient s'offrir... Le romantisme tourmenté du 19e siècle nous conduit vers la révolution industrielle; le charbon qui était au fondement de la richesse et de l'identité de notre région (le musée même repose sur un ancien terril plat). Les mines sont fermées mais la mémoire des "gueules noires" est vive.  L'exposition leur rend hommage avec, entre autres, une série de très belles photos en noir/blanc.

   Au 20e siècle, avec Malévitch, Hantai, Soulages, le noir devient une couleur à part entière, magistrale, riche et mobile. Les surfaces noires irrégulières accrochent et reflètent la lumière et les formes se mettent à vivre: elles changent en fonction du déplacement du spectateur devant la toile.

   Pourquoi "Soleils Noirs"? Pour moi, cet oxymore qui associe le drame, le deuil, la tristesse au soleil, nous conduit, par la force expressive de l'art, à leur sublimation éclatante.

 

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